La question de la forme ne concerne pas que le déploiement de la personnalité et la fixation de la conscience. En fait, l'observation des pulsions dites "extérieures à soi" génère elle même systématiquement une forme.
En effet, à chaque fois que nous tentons de saisir une pulsion, ou pour le dire plus trivialement, que nous tentons de prendre connaissance d'une situation, nous devons étendre notre conscience d'une manière suffisante. Ce faisant, nous finissons par percevoir la dynamique selon une forme, une image, qui exprime le sens de ce que nous avons sous les yeux.
Exemple : Vous allumez votre télévision et observez un combat terrible sur un ring : ça a l'air d'être un match de combat libre. Pourtant avec un peu plus d'acuité vous vous rendez compte que la situation est autre : ce n'est pas du combat libre, c'est du catch, un combat fort bien mis en scène.
Ainsi, la forme première que vous aviez donné à la situation a évolué lorsque votre conscience s'est assez agrandie pour appréhender le sujet. Nous sommes passés de la forme « combat » à la forme « catch ».
Mais ici, vous aurez probablement remarqué une chose importante : que la conscience perçoive une pulsion entière, ou un simple morceau, elle perçoit quoiqu'il advienne une forme ! Lorsque la pulsion est saisie, toute entière, la forme est riche, et surtout belle, mais lorsque la conscience est trop petite, elle perçoit quelque chose de "difforme".
Exemple : Le macho est une portion très caricaturale et réduite de la pulsion qu'est la « masculinité », qui est tellement plus. Il en est de même pour la « bimbo » qui est une difformité au regard de la féminité.
Ce point est extrêmement important !
Ces formes, sont autant d'âmes, autant d'expressions de la nature. Âmes incomplètes lorsqu'elles ne sont qu'une partie de pulsion, mais de vraies âmes essentielles lorsqu'elles expriment l'intelligence sous-jacente de la nature.
Autant d'anges et de démons en action ? A vous de voir.
Remarque : Si vous voulez rester technique, la forme est une pulsion identifiée (partiellement ou complètement). Le nom que l'on donne à la nature telle qu'on l'a saisie. Voilà tout.
Maintenant, nous allons tenter de préciser un peu plus la notion de forme.
En fait de forme, il ne faut pas vraiment y voir une image au sens strict, mais figuré. Comprenez ici que l'on ne parle pas d'une simple représentation, mais d'un symbole. En ce sens, cela peut-être traduit par une image, mais pas que, l'essentiel étant que l'on y figure une synthèse.
En vérité on remarquera que le support le plus commun d'une synthèse n'est rien d'autre que le mot, ou pour le dire autrement, le mot est l'image la plus parlante qui soit. Si je vous parle d'un "macho", vous et moi aurons des représentations picturales différentes de la chose, pour autant le mot "macho" tendra à faire coïncider nos définitions sur des points clés, car le mot cristallise des attentes intrinsèques, ou à minima implicites.
Mais il convient d'être plus descriptif. Ou plutôt... astucieux ! Le terme de "symbole" possède une connotation un peu trop artistique, et virtuelle. S'il fallait être plus concret, ou pourrait considérer la forme, dans sa synthèse, comme un... système !
La forme est un système ! Ou pour le dire encore autrement, un petit univers, ou petit cosmos. Une façon à part entière d’agréger et d'ordonnancer (ou organiser si vous préférez) les pulsions compatibles avec cette forme de vie, dans les limites induites par sa puissance.
Considérons par exemple une forme particulière : l'archétype (forme) du petit bourgeois. Très souvent il va de pair avec une belle voiture, et on l'imagine à son aise dans les beaux quartiers. On voit tout de suite que l’archétype n'est pas l'image d'un seul individu, mais d'un mode de vie tout entier. En vérité on dira qu'il est bien plus : un regard sur le monde, une façon de sentir, ressentir, penser, bouger, une façon de considérer les autres (tous règnes confondus), une façon de parler, désirer, se projeter. Mais aussi certaines sympathies vis à vis de lieux, relations, et autant d'antipathies pour ce qui menace son système. C'est tout une articulation, animation.
C'est du charabia ? Pourtant je suis sur que vous me suivrez si je vous dis que l'on attend pas du petit bourgeois qu'il se ballade dans un HLM. Le bourgeois n'est pas qu'une apparence, c'est une façon d'être, et c'est aussi simple que cela.
Maintenant que tout cela est dit, attardons nous sur la caractéristique principale d'une forme, qui n'est rien d'autre qu'une âme tel qu'on la saisit. Qu'est ce qu'une âme a de particulier ?
Elle est... Vivante !
Autrement dit, toutes ces formes, si tant est qu'elles soient des réalités pulsionnelles, sont autant d'âmes vivantes. De ce fait, on peut leur prêter autant d'intelligence, de pouvoir de création, que n'importe quelle âme individuelle.
Remarque : C'est la différence que j'avais sous-entendu précédemment avec la sociologie au regard des catégories. Ici les formes, archétypes, ne sont absolument pas des concepts.
Mais si certaines âmes, formes, sont proches de la source de leur intelligence, ce n'est pas le cas de toutes.
Certaines en sont très éloignées, pauvres, elles fonctionnent comme des séquences, des bouts d'animation, des logiciels pourrait-on dire, voire des cinématiques. D'autres sont carrément opposées à leur source : des logiques tordues à l'envers, ou d'une manière fallacieuse pour nous tromper quant à l'usage du vivant.
On remarquera que, quelque soit la forme tronquée ou perverse au regard de l'essentiel, elle ne peut avoir de pouvoir sur le monde qu'à travers notre propre manque de conscience (Imaginez un peu que vous ne connaissiez que vos devoirs et pas vos droits au regard de la loi ?).
Sans considérer les pulsions de la nature qui se débrouillent très bien d'elle même, il est certaines situations, dynamiques, qui nécessitent expressivement un concours humain pour se développer. Seulement tant que ces pulsions ne sont pas utilisées à leur juste grandeur, nous ne les déployons que selon des logiques pauvres et déjà éprouvées.
Exemple : Une méconnaissance de l'amour peut donner lieu à une forme trompeuse dans la relation. En fait d'amour partiel, la conscience ne verra que de la jalousie. Et tant que nous considérons les situations sous l'angle de la jalousie, alors celle-ci formera toutes les dynamiques relationnelles. Autrement dit nous donnons à cette forme imparfaite le pouvoir de reformer nos situations de vie, et en somme notre réalité.
De la même manière nous pouvons appliquer ce raisonnement à des forces très concrètes telles que l'argent. Comment percevez-vous ce rapport humain ? De quelle nature procède-t-il ?
Remarque : On pourrait presque dire que les formes défectueuses sont « générées » par le manque de conscience. En vérité je pense que c'est plus compliqué que cela, mais une chose est certaine, c'est bien comme cela que nous générons leur pouvoir sur le monde !
La forme, l'âme, la nature, la pulsion... EST créatrice !
Mais il faut vraiment comprendre en quoi le phénomène n'est pas conceptuel. Il faut saisir ce que le caractère vivant de l'âme implique : autant l'intelligence que la création et encore le mouvement. Il n'est qu'un seul terme qui peut permettre de s'approcher d'une telle réalité.
C'est ce que l'on appelle la magie.
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